D’Adélard à Éliane Bélanger: 4 générations de bouchers
Alors que la saison du barbecue s’amorce en force, il se trame quelque chose à la boucherie Adélard Bélanger et fils : la doyenne du Marché Atwater s’apprête à changer de mains. Au cours de la prochaine année, l’institution sera acquise par Éliane Bélanger, arrière-petite-fille du fondateur, et deux employés de longue date de la boucherie, Sébastien Perras et Charles Cuny.
Cette passation des pouvoirs ne fait pas peur aux futurs propriétaires, qui ont tous les trois gagné leurs galons au sein de l’entreprise. « C’est un gros défi de reprendre une boucherie qui a 90 ans, la première du marché, croit Sébastien. Mais les fondations sont bien solides. On a une histoire derrière nous, le commerce est bien implanté. Ce n’est pas comme si on partait quelque chose de nouveau. On compte sur une clientèle super fidèle », poursuit celui qui travaille avec les Bélanger depuis une dizaine d’années.
De son côté, Éliane œuvre dans le commerce familial depuis longtemps. Elle se souvient même d’y avoir travaillé dès l’âge de 8 ou 9 ans, « juchée sur une caisse de lait ». Pourtant, reprendre l’entreprise familiale ne faisait pas partie de ses plans, elle qui a d’abord étudié en relations industrielles avant de se diriger vers la cuisine. « Ce n’est que récemment que l’opportunité de succéder aux propriétaires actuels [René Bélanger, son père, et Éric Perreault, un cousin de ce dernier] s’est matérialisée. Ce n’était pas prévu, mais quand l’occasion s’est présentée, je l’ai saisie », raconte celle qui est derrière les très populaires plats cuisinés de la boucherie.
Pour compléter la nouvelle équipe de propriétaires, les deux collègues ont misé sur Charles, un jeune Français de 25 ans formé dans l’Hexagone. « Quand Charles est arrivé à la boucherie il y a trois ans, c’était comme une bénédiction! se rappelle Éliane. Il venait combler certains des besoins qu’on avait. À trois, on peut chacun mettre de l’avant nos forces. » « On se complète! ajoute Sébastien à propos de cette équipe bien soudée. On a chacun nos responsabilités et on se laisse de l’espace. Et avant tout, on est des amis. »
La famille Bélanger est présente au Marché Atwater depuis son ouverture, en 1933. D’Adélard à Éliane, les Bélanger ont toujours conservé une mainmise sur le commerce. « J’ai vu le marché changer », dit Éliane, 35 ans, en se rappelant une époque pas si lointaine où le sol était couvert de bran de scie et on fumait encore à l’intérieur. Avant, les gens privilégiaient davantage la quantité à la qualité. Aujourd’hui, ils ont un souci de qualité plus grand et sont davantage épicuriens. »
La boucherie compte également son lot de clients qui viennent faire leur tour depuis des décennies. « Il n’y a pas une semaine qui passe sans qu’un client s’arrête pour nous parler de l’époque de Jean, le grand-père d’Éliane », confirme Sébastien. Le poids de la tradition n’étouffe certainement pas le jeune trio, qui mijote tranquillement les idées à mettre en branle lorsque le transfert sera confirmé, d’ici quelques mois.
Des rénovations, pour moderniser l’espace de travail et revamper les comptoirs, sont notamment au menu. Par sa seule présence, Éliane apporte aussi un vent de changement dans un monde essentiellement masculin. « C’est vrai qu’il y a peu de femmes en boucherie, mais tranquillement, on en voit de plus en plus », observe-t-elle, ajoutant qu’il y avait quelques sceptiques quant à la capacité d’une femme de reprendre l’entreprise familiale.
« Quand je vois arriver une carcasse de 500 livres, je suis contente de ne pas être toute seule à m’en occuper. Mais j’ai fait mes preuves. […] J’ai trouvé un travail où je me sens valorisée, où mes compétences sont reconnues et appréciées », dit-elle.
Une chose ne changera jamais. « On va toujours conserver l’histoire de la boucherie et sa tradition, assure Sébastien. Il faut que ça reste un endroit à dimension familiale, où les employés ont du fun et les clients sont bien servis. »
La chose qui vous motive à vous lever si tôt le matin?
J’aime ma job, alors je n’ai pas trop de misère à me lever le matin! Je sais que je vais être occupé toute la journée et que mon travail va rendre les gens heureux.
Un produit incontournable à se procurer quand on visite votre boutique?
L’onglet de bœuf dans une marinade aux oignons doux. On est reconnu pour ça, c’est le gros vendeur de la place! Et il est parfait pour le barbecue.
Quelques mots pour décrire l’ambiance du marché?
Le plaisir et l’entraide entre les commerçants.
Un texte de Benoit Valois-Nadeau du magazine Caribou
Photos de Daphné Caron
Découvrez les autres PORTRAITS DE FAMILLE
La grande famille des Marchés publics de Montréal est forte des producteurs, des marchands et des artisans qui la composent. Depuis des années et des générations, ils se lèvent tôt, expérimentent, ratent parfois, recommencent tout le temps, veillent, récoltent et réussissent ! Jour après jour, ils se tiennent fièrement debout derrière leurs étals comme au bout d’une table où ils nous invitent à manger. Ils sont le cœur et l’âme d’un marché, l’essence de sa personnalité, la raison pour laquelle on a envie d’y retourner. La série Portrait de famille tient à rendre hommage et à raconter l’histoire de ces piliers de nos Marchés publics.
Ce projet a été financé par l’entremise du Programme Proximité, mis en œuvre en vertu du Partenariat canadien pour l’agriculture, selon une entente conclue entre les gouvernements du Canada et du Québec.
Partagez...
Haut de page