Les Délices de la Mer: Une histoire de pêche gaspésienne
Dès que la réjouissante saison du crabe des neiges tire à sa fin, c’est au tour du homard de prendre le relais. Chaque année, l’arrivée attendue du crustacé gaspésien, suivi de très près par celui des Îles-de-la-Madeleine, lance la saison quelques jours avant la fête des Mères et bat son plein jusqu’à la fin juin. La frénésie qui gagne les ports de pêche suit alors les camions de livraison jusqu’au marché.
Sur ses étals, la poissonnerie Les Délices de la Mer propose le succulent homard vivant ou cuit, ou encore en guédille. « La fin de semaine, on cuit du homard du matin au soir, ça n’arrête jamais! » soutient le propriétaire, Christian Servant, qui précise ne tenir que des gros homards à la chair plus ferme et les faire cuire dans une eau dont le taux de salinité est comparable à celui de la mer.
Le secret pour une guédille de homard parfaite? « Ajouter de l’estragon frais et s’en tenir à un pain à hot-dog traditionnel, assure le Gaspésien. C’est le fait que le pain soit peu goûteux qui permet de faire ressortir la délicieuse saveur de la chair de homard bien fraîche. »
Voilà plus de 20 ans que Christian Servant se consacre à sa passion pour les produits de la mer. « À 25 ans, je travaillais dans un autre domaine qui m’amenait à me déplacer dans différentes régions du Québec. J’ai alors constaté ce qui se vendait comme poissons et fruits de mer. Je trouvais que ça n’avait aucun sens, que ça manquait de variété, se rappelle l’homme qui était habitué de manger des produits de la mer frais et locaux. J’avais envie de faire découvrir aux Québécois de vrais produits de qualité. »
De ce désir est né en 1998 Les Délices de la Mer, d’abord sous une tout autre forme que les poissonneries qu’on connaît aujourd’hui. « J’ai commencé en faisant les festivals, se souvient Christian. J’installais mon food truck au Festival western de Saint-Tite, au Festival de la gibelotte de Sorel-Tracy, aux festivals de blues, aux marchés de Noël, etc. Je les faisais tous : 14 festivals chaque saison! » Il proposait alors pas moins de 36 mets à base de fruits de mer, de la salade de crabe à la poutine aux crevettes, en passant par les guédilles au homard, la chaudrée de palourdes et même des bourgots. « J’adore les fruits de mer et j’ai toujours adoré cuisiner. C’est vraiment une passion », indique l’entrepreneur.
Vers la fin de 2002, Christian pose sa roulotte pour un dernier événement au marché de Noël du Vieux-Port de Québec et décide d’y rester pour l’hiver. « Je ne suis jamais parti de là, je suis encore ouvert au Grand Marché de Québec », souligne en riant le marchand. Dès lors, il propose des poissons et fruits de mer frais ainsi que quelques mets cuisinés dont il a élaboré les recettes avec sa mère.
L’année suivante, en 2003, Christian voit une opportunité alors que le marché Jean-Talon s’agrandit et se refait une beauté. Il pose sa candidature pour y avoir son commerce et son projet est accepté. Il opère sa poissonnerie durant quelques mois dans le local actuel et décide de louer l’étal en face pour la cuisson du homard et du crabe, mais aussi pour préparer quelques mets prêts-à-manger, comme la morue panée.
Depuis, Christian partage son temps entre Montréal et Sainte-Anne-des-Monts, où il a ouvert un commerce mixte (poissonnerie, café et épicerie fine) – actuellement fermé à cause de la pandémie – qui sera éventuellement relocalisé. S’est ajoutée en 2018 une succursale à Boucherville.
Avec trois succursales, un local de production et une cinquantaine d’employés, Les Délices de la Mer se positionne comme une référence grâce à son offre d’une fraîcheur et d’une qualité incomparables. « Le port de pêche est à un kilomètre de chez moi. Je vois les bateaux rentrer au quai », souligne Christian, qui n’hésite pas à aller à la rencontre des pêcheurs et se permet à l’occasion de les accompagner.
Les poissonneries de Christian offrent donc une belle plongée en mer gaspésienne : 80 % des produits en sont issus. Au gré des saisons et des arrivages, homards en quantité, pétoncles frais, flétans de l’Atlantique, turbots, sébastes et crabes viennent colorer les présentoirs. Mais Les Délices de la Mer propose aussi des spécialités des Îles-de-la-Madeleine, de la Côte-Nord et des Maritimes, notamment le loup-marin, les huîtres, les moules, les pétoncles et les mactres de Stimpson.
Au local de production de Sainte-Anne-des-Monts, la cousine de Christian a pris la relève de sa mère et de sa tante pour gérer la préparation des mets cuisinés. Pâtés de morue, galettes d’omble chevalier et gravlax sont régulièrement livrés dans les trois poissonneries.
Certifiée Fourchette bleue, l’entreprise se fait aussi un devoir de mettre de l’avant certaines espèces délicieuses prisées à l’étranger, mais parfois boudées chez nous. Oursin du Bas-Saint-Laurent, loup-marin des Îles-de-la-Madeleine, baudroie d’Amérique et bourgot garnissent notamment les comptoirs de ses poissonneries. « Les gens les connaissent mal. Parfois, aussi, ces produits méconnus sont simplement mal cuisinés, indique l’entrepreneur. Un beau poisson à chair blanche comme le turbot, par exemple, doit être cuit très légèrement.»
Mais au cours des prochaines semaines, c’est le homard qui tiendra la vedette des étals et qui occupera Christian!
Trois mots pour décrire l’ambiance du marché?
Familiale, proximité avec le producteur et gage de qualité.
Votre plus beau souvenir lié au fleuve?
L’arrivée du crabe! Aller chercher en famille les crabes des neiges vivants au bateau de pêche, ç’a été très inspirant pour moi. C’est une tradition de manger du crabe à Pâques en Gaspésie.
Un produit incontournable à se procurer quand on visite votre kiosque?
Plusieurs! Évidemment, le homard et le crabe cuits directement pour le client, tu ne peux pas les avoir plus frais, mais aussi les huîtres et les poissons, dont le turbot. Quant aux mets préparés, la coquille Saint-Jacques est un incontournable.
Un texte de Marie-Eve Blanchard du magazine Caribou
Photos de Dominique Viau, BODOÜM Photographie
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La grande famille des Marchés publics de Montréal est forte des producteurs, des marchands et des artisans qui la composent. Depuis des années et des générations, ils se lèvent tôt, expérimentent, ratent parfois, recommencent tout le temps, veillent, récoltent et réussissent ! Jour après jour, ils se tiennent fièrement debout derrière leurs étals comme au bout d’une table où ils nous invitent à manger. Ils sont le cœur et l’âme d’un marché, l’essence de sa personnalité, la raison pour laquelle on a envie d’y retourner. La série Portrait de famille tient à rendre hommage et à raconter l’histoire de ces piliers de nos Marchés publics.
Ce projet a été financé par l’entremise du Programme Proximité, mis en œuvre en vertu du Partenariat canadien pour l’agriculture, selon une entente conclue entre les gouvernements du Canada et du Québec.
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