La Journée internationale des droits des femmes : La place des femmes en agriculture
La Journée internationale des droits des femmes est une occasion de saluer tout le travail accompli vers l’égalité entre les femmes et les hommes, mais également de souligner le chemin qu’il reste à faire, notamment en agriculture. Nous sommes choyés de pouvoir compter sur l’expertise des femmes dans les entreprises agroalimentaires et il est essentiel d’être un vecteur de changement afin qu’elles continuent à prospérer dans notre domaine.
Alors qu’on sait qu’historiquement au pays, la majorité des femmes ont accédé au métier d’agricultrices par la voie du mariage qui leur aura imposé un « travail d’épouse », les responsabilités qu’ils leur étaient réservés étaient des tâches domestiques reliées à la famille et à l’organisation du quotidien travail-famille, ou encore des travaux agricoles sans rémunérations.
Selon le Conseil du Statut de la Femme, « l’interdépendance des activités exécutées au sein du foyer et de la ferme a contribué à tenir dans l’ombre la riche contribution des femmes à l’agriculture pendant des décennies ».
À l’heure actuelle, au Québec, une agricultrice sur trois travaille encore dans une entreprise familiale sans salaire ni parts sociales. Selon le Fichier d’enregistrement des entreprises agricoles du MAPAQ de l’année 2018 , 27% de l’ensemble des propriétaires seulement étaient des femmes. Et seulement 6,4% des entreprises agricoles sont détenues exclusivement par une femme.
Cette disparité s’explique de différentes façons. Notamment, la disparition progressive de la polyculture-élevage au profit d’une agriculture spécialisée qui a mené vers un effacement de la contribution des femmes aux travaux agricoles. La professionnalisation de l’agriculture a mené le domaine à maximiser la production par tous les moyens. Lorsqu’un métier se professionnalise, il tend à valoriser des actes techniques qui sont visibles, par exemple le travail dans les champs, et qui relèvent traditionnellement des hommes. Cette transformation a exclu les femmes des productions qu’elles contrôlaient jusqu’alors, comme celle du lait. Ce changement est venu creuser des inégalités entre les sexes qui étaient déjà observables dans le secteur.
Heureusement, depuis plusieurs années, le vent tourne chez les nouvelles générations. À force de revendications et de modifications législatives, les femmes ont eu accès à la propriété agricole, si bien qu’elles sont désormais de plus en plus nombreuses à se lancer en agriculture à titre d’entrepreneures.
À l’heure où l’avenir de l’agriculture québécoise fait face à des enjeux cruciaux, à ce qui a notamment a trait à la relève, l’apport des entrepreneures agricoles revêt un caractère plus que stratégique. Nous ne pouvons pas nous passer de cette riche expertise. Les agricultrices participent pleinement aux transformations requises en matière d’environnement, de régionalisation et de technologies. Les actions qu’elles déploient confirment leur rôle d’actrices de changement social.
Les femmes s’éloignent davantage de la voie traditionnelle pour s’établir en agriculture. Au Québec, le démarrage d’une entreprise hors de la famille est une option plus fréquente chez les femmes que chez leurs homologues masculins. Ce modèle d’affaires pourrait présenter un caractère subversif en contribuant à transformer des représentations et des rôles qui définissent traditionnellement le milieu agricole.
Cette vision de l’agriculture ouvre notamment la voie à la coexistence de différentes façons de faire, comme de conjuguer des productions conventionnelles avec d’autres, comme l’agriculture durable ou des productions en émergence. Toutes des voies qui mènent vers un modèle d’agriculture plus pérenne.
Les grandes institutions comme le MAPAQ et l’UPA participent eux aussi à reconnaître l’important travail des agricultrices. Le MAPAQ confère aujourd’hui le statut d’agricultrice à celles qui détiennent des parts dans une entreprise agricoles et/ou qui sont conjointes d’un agriculteur et non pas seulement aux propriétaires d’entreprises. De son côté, le syndicat affilié à l’UPA regroupant des agricultrices du Québec admet comme membres toutes les femmes qui œuvrent dans le secteur de l’agriculture, quelle que soit leur fonction. Ainsi considérées, les agricultrices formaient en 2008 un important groupe de 24 915 personnes.
Autant de femmes qui repensent les modèles établis pour ouvrir la voie à de nouvelles façons de définir l’agriculture et nous sommes fiers de les accueillir en nos lieux et de leur offrir une multitude d’opportunités de commercialisation et afin qu’elles partagent le fruit de leurs récoltes et leur expertise avec les familles montréalaises !
Références :
Les femmes en agriculture : https://csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/Avis_femmes_agriculture_20191121.pdf?utm_source=avis-agricultrice&utm_medium=embargo&utm_campaign=journalistes
https://ici.radio-canada.ca/mordu/5758/sortir-rang-julie-francoeur-femmes-agriculture
Sortie du rang : la place des femmes en agriculture, Julie Francoeur, Éditions du remue-ménage, Montréal, 112 pages
Crédit photo: Maude Chauvin
À lire également...